Pourquoi faut-il se méfier du chiot parfait?

Les gens qui entraînent leur propre chien d’assistance ont une forte pression dès le premier jour.

En plus des difficultés que l’handicap cause au quotidien, vient aussi la responsabilité d’un laborieux processus de 2 ans pour transformer un petit bébé mammifère d’une autre espèce (qui ne comprend pas le français et qui croit que les excréments de chat sont un délice!) en un partenaire d’aide médicale fiable et duquel vous aller dépendre pour la prochaine décennie, qui dans certains cas pourrait faire toute la différence entre la vie et la mort.

Aucune pression, non? Reconnaissons la vérité : la barre est très haute. Et, des fois, vous êtes légèrement aveuglés par votre enthousiasme.

Arrêtez-moi si vous avez déjà entendu cette histoire auparavant.

C’est souvent votre premier chien que vous allez entraîner vous-même. Vous avez attendu des mois, voire des années, pour entamer ce projet crucial.

Vous avez fait vos recherches. Vous avez regardé des vidéos, parlé avec d’autres bénéficiaires, trouvé une communauté sur les chiens d’assistance où vous vous sentez à l’aise.

Après tout cet apprentissage et cette attente, vous avez compté les minutes avant que votre chiot arrive à la maison. Ce sera vous et votre chien contre le monde, partenaires pour la vie!

La plupart du temps, vous n’êtes pas un éducateur canin professionnel, mais vous avez fait suffisamment de travail avec le chien de votre famille, vous avez confiance en vos aptitudes à éduquer votre futur chien d’assistance. De plus, vous avez des ressources à votre disposition en cas de problèmes. Vous êtes impatients d’enfin commencer cette aventure!

Arrivée du chiot, entrée en scène.

Une fois arrivé, le chiot est parfait.

Pas juste un bon chiot, mais transcendant, sublime, le meilleur au monde! Il n’est pas un chiot parmi tant d’autres, il est Le Chiot, le futur partenaire qui va changer votre univers. Il déborde de potentiel. Son haleine de chiot respire l’espoir.

Alors, vous vous lancez dans l’entraînement avec brio. Finalement, vous pouvez enfin commencer à appliquer le plan si longuement imaginé. Le chiot apprend assis, coucher, donne la patte, roule, tourne! Il rayonne dans sa classe d’obéissance. Il est merveilleux. Votre confiance grandit avec chaque nouveau succès et, à se stade, tout est un succès. Après tout, c’est le chiot parfait!

Après quelques semaines de cet entraînement intense, vous avez une crise médicale, car vous êtres une personne handicapée et cela peut vous arriver régulièrement. C’est d’ailleurs pour ça que le chiot est là!

Puis, le chiot fait un comportement, avant ou pendant la crise. « Était-ce une alerte? Une alerte naturelle? Par Jupiter, je crois bien que ce l’était! Ça ne peut qu’être ça! »

Vous êtes à la fois étonné et soulagé. Vous êtes sur la bonne voie! Ce défis d’entraîner votre propre chien d’assistance doit bien être possible après tout, avec un chiot aussi parfait!

Donc, vous poussez le chiot un peu plus loin, un peu plus vite. Après tout, le chiot réussit sur tous les points. L’entraînement s’intensifie. Le chiot peut l’endurer. Il est un miracle sur quatre pattes, un Einstein poilu!

Votre duo commence l’accès public tôt, vraiment tôt. Le chiot connaît 10 tâches à l’âge de 6 mois et alerte naturellement à tous les handicaps possibles. (Avez-vous vu ses moustaches remuer? Êtes-vous diabétique? Vous devriez vérifier votre taux de glycémie, mais de rien!) Votre équipe fait des sorties et des entraînements, huit heures chaque jour, sans faire de pause. Les autres chiens ont besoin d’y aller plus lentement et de travailler sur leur fondation à cet âge, mais ce chien, votre chien, est un prodige. Il peut tout supporter.

…Jusqu’à tant qu’il ne puisse plus.

La recette pour le parfait petit prodige.

Au commencement de votre projet de chien d’assistance, c’est normal de sentir une désagréable combinaison d’ambition et de terreur. À ce point, vous avez déjà gravé dans votre cerveau qu’il y a seulement deux issues possibles, un succès retentissant ou un échec cuisant.

Nous savons que vous vous faites un devoir solennel de protéger l’honneur des autres équipes de chiens d’assistance en étant vous-mêmes irréprochables, inquestionnables, parfaits à toute heure du jour et de la nuit. Nous savons qu’en bas de ce niveau, vous penseriez être une grave injure à la réputation de TOUTE la communauté de chiens d’assistance et une honte pour votre entourage.

Maintenant, laissez ce sentiment mariner pendant des mois et des années en une soupe toxique de surenchères subtiles et d’humbles vantardises qui imprègnent la communauté Internet des chiens d’assistance.

Il n’est pas étonnant que chaque novice vacille sur la fine ligne entre l’optimisme et la panique.

La tragédie du parfait petit prodige.

La tragédie du parfait petit prodige c’est : malgré leur prédisposition initiale, ils vont souvent faillir à maintenir leur propre potentiel jusqu’à la fin. Beaucoup ont plus de difficultés que nécessaire, beaucoup d’autres échouent complètement leur parcours et sont déclassés.

En outre, souvent ils n’échouent pas en raison de vices cachés qui les condamnaient depuis le départ. Ils échouent parce que le maître devient si obsédé d’arriver à la ligne d’arrivée rapidement qu’il continue d’avancer précipitamment sur des fondations bancales.

L’entraînement d’un chien d’assistance implique beaucoup de pression, autant sur le bénéficiaire que sur le chien. C’est pourquoi les critères d’admissibilité sont si sévères pour avoir accès à un programme de chien d’assistance.

Ultimement, sous la pression, les fondations bancales s’effondrent.

Pour la défense d’y aller lentement.

Il y a une expression dans la communauté de l’éducation canine qui dit que « lentement est rapide et rapide est lentement » qui veut dire qu’il est souvent plus rapide sur le long terme d’avoir de bonnes fondations dès le départ. C’est encore plus vrai pour l’éducation des chiens d’assistance ou de tout type de chien de travail, l’épuisement professionnel (burn-out) est un risque sérieux.

Maintenant, relisez encore ce paragraphe.

Et encore.

Ancrez-le au plus profond de vous-même, tout ce message à propos de la perfection et de garder la réputation des chiens d’assistance, parce que cela est très important. Lentement est rapide et rapide est lentement. Mijoter cette idée. Tenez-vous-y. Écrivez-le en gros sur le cahier où vous notez votre plan d’entraînement de votre futur parfait petit chien.

Si vous voulez « la perfection » lorsque vous l’entraînerez, la meilleure façon de réussir est de l’obtenir en l’entraînant lentement et en construisant des fondations solides.

Laissez le chiot apprendre des choses de chiot. Concentrez-vous sur la qualité et non la quantité dans votre plan de socialisation. Supportez le cerveau de chien alors qu’il change pour devenir un adolescent et attendez-vous à ce qu’il ait quelques régressions temporaires. Évaluer votre progression régulièrement et ciblez vos points faibles pour les travailler au lieu de seulement améliorer les points forts. Rappelez-vous que vous êtes en train de forger un partenaire fonctionnel, vous ne faites pas une compétition vers la ligne d’arrivée.

Les meilleurs programmes de chiens d’assistance attendent consciencieusement que le chien ait entre 18 et 24 mois avant de le placer auprès de son bénéficiaire. Ceci n’est pas un accident ou une coïncidence. C’est de l’orgueil, pur et simple, de penser qu’un nouveau propriétaire de chien formé indépendamment aura un chien fiable, éprouvé, stable et prêt à accéder au public en deux fois moins de temps que quelqu’un qui le fait pour métier et qui travaille avec de meilleures ressources, connaissances, etc.

Quand les gens racontent leurs histoires à propos de leur chiot parfait, ça déclenche un signal d’alarme mentalement. Quand vos amis assurent que leur chien tout juste adolescent a déjà une douzaine de tâches maîtrisées, il n’y a pas de quoi être excité, mais plutôt s’inquiéter.

Car, les chiots parfaits sont souvent victimes d’épuisement professionnel (burn-out).

Entraînez votre propre chien d’assistance, choisir lentement plutôt que parfait.

Nous voulons tous croire que notre chiot est le parfait prodige et qu’il est littéralement né pour faire ce travail. Vous avez besoin d’autant d’aide que vous pouvez en avoir. Si vous n’aviez pas besoin d’aide, vous ne formeriez pas un chien d’assistance pour vous-même en premier lieu. Et, avec toute la pression que vous avez de vouloir être parfait en toutes circonstances, vous croyez parfois qu’il vous faudra un chien magique pour réussir.

La décevante réalité est qu’il n’existe aucun chiot parfait.

Par contre, il y a de nombreux chiots adéquats qui peuvent être modelés en chiens d’assistance avec de l’effort, du talent et de la patience.

L’ingrédient essentiel est le temps. Prenez le temps qu’il faut et appliquez vous.

Texte librement traduit et adapté par Psy’chien Intl. OCT-2020

LEVEL UP DOG TRAINING, “Why Perfect Service Dog Puppies Are A Red Flag’’ [En ligne], 17 juin 2017. [https://www.levelupdogtraining.com/perfect-service-dog-puppies/?fbclid=IwAR3qpIFfx9HnL2IGaLh71Bp-cAdiBd3qTrae8_kcrjqPZeexXurWkb-4oFI].

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